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mardi 28 mars 2023
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L’élite, seul(e) chez soi

ChroniqueL’élite, seul(e) chez soi

L’élite. Rien que le son de ce mot est une sonate à mes oreilles. Faire partie de l’élite, c’est mon rêve d’enfant. Car j’ai toujours supposé que, là-haut, je n’aurai plus de soucis. Si bien que le travail manuel, suer sang et eau n’est pas tellement quelque chose qu’on n’a jamais connu.

Tous les besoins de base sont satisfaits et on participe au tour de vis du pouvoir. Qu’y a-t-il de plus beau ? Mais en y regardant de plus près, l’élite a également ses soucis et ses peurs. Les membres de cette “caste” ont un caractère fondamentalement différent de ceux des couches dites “inférieures”.

L’élite dispose de tous les leviers utiles et nécessaires pour orienter les affaires malgaches dans la bonne direction, pour autant qu’elle le veuille et qu’elle soit d’accord sur la direction à suivre et qu’elle ne soit pas distraite par des absurdités inutiles. Malheureusement, en général, nous avons parfois du mal à distinguer ce qui est important de ce qui ne l’est pas dans le cirque quotidien qui est la vie politique dans laquelle un simple tweet nous scandalise.

Nous vivons à une époque où il est difficile d’avoir une vision claire des choses. Le monde est en train de changer d’une manière que nous avons du mal à comprendre nous-mêmes. Rien ne semble plus aller de soi. Les sociétés ont besoin de soutien, d’orientation et d’une vision claire. L’élite doit s’y mettre. C’est sa raison d’être.

Cependant, donner une orientation ne signifie pas exclusivement aiguiller une direction politique, qu’elle soit conservatrice de droite ou libérale-démocratique, qu’elle soit fondamentalement critique ou conforme au statu quo. L’orientation veut dire aussi la façon de comment dialoguer avec nous-mêmes. L’élite est le gardien de cet acquis sociétal.

La force de l’Homme réside dans le débat. Plus précisément dans le débat argumenté avec ceux qui ne sont pas forcément du même avis. La force d’une société réside non seulement dans le fait de supporter le dialogue avec les autres, pas dans une approche forcée, mais aussi de le cultiver d’une manière active. Accepter qu’une multitude d’opinions existe est un indicateur des sociétés fortes.

Ainsi, une élite doit se faire un devoir de protéger le principe selon lequel la vérité soit la somme de nos dialogues. Se forger une opinion et la défendre de manière argumentée sont des conquêtes humaines qui tombent malheureusement de plus en plus dans l’oubli.

Avons-nous encore la volonté et la capacité de voir la vérité telle que nous la comprenons et de la refléter avec celle que les autres voient ? Trop souvent, nous baissons nos têtes pour regarder nos écrans afin de pouvoir circuler virtuellement dans des cercles avec ceux qui sont exactement comme nous. La “facebookisation” de la société et de la politique fait en sorte que chacun vit dans sa petite bulle.

Mais à un certain moment, il faudrait nous demander à quel moment avons-nous vraiment cherché à nous engager dans une discussion honnête et sincère avec ceux qui n’appartiennent pas à notre propre couche sociale ?

Que savons-nous vraiment de notre voisin, qui vit depuis des années à côté de chez nous sans que nous ne l’ayons jamais invité ? Il y a un monde au-delà de nos petits cercles. Soyons tous conscients que les bulles que nous chérissons tant impactent sur notre façon de voir la vérité.

Faire partie de l’élite est un privilège, mais signifie avant tout une responsabilité pour l’ensemble de la société. Il faut penser plus grand, rêver plus grand et planifier plus grand. Une élite qui s’isole de la vie réelle et des autres, perdrait son rôle de gardien des affaires publiques.

Les sociétés sont fortes et résistent à l’épreuve du temps lorsqu’une élite peut y être corrigée par le bas. Si nous pensons que l’action de l’élite n’a plus rien à voir avec la réalité et que si les projets initiés n’aident plus le voisin à se développer car il ne profite pas des mêmes privilèges c’est à nous seuls de le revendiquer à nouveau.

La question reste toutefois de savoir si ceux qui sont “en bas” continuent à supporter la suite des événements ou s’ils comprennent le rôle qui leur est dévolu.

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