« Bien évidemment, ce n’est pas du tout facile d’intégrer un grand parti (comme le HVM) et surtout d’être considéré par ses pairs. Pourquoi je dis grand parti ? Cette formation a dirigé Madagascar durant un mandat de cinq ans. J’ai intégré le parti en tant que cadre en 2017. Après que nous ayons été vaincus lors de l’élection de 2018, nous nous sommes positionnés dans l’opposition. Alors, les opportunistes – les gens qui n’avaient intégré le HVM que pour être nommés, pour devenir ministres ou directeurs généraux dans les ministères – sont tous partis. J’ai choisi de continuer de faire de la politique et de rester au sein du HVM.
(…) Au niveau du parti, la participation des jeunes aux prises de décision est vraiment appréciable. Ils prennent des décisions très rapidement. Au niveau national, leur volonté de s’intégrer à la vie politique tarde à se développer. Elle devrait être entretenue et renforcée par les partis politiques, car les jeunes ont de l’ambition. Ils ont de fortes capacités de réseautage. C’est à travers la capitalisation de ces atouts qu’ils pourraient s’impliquer davantage dans la gouvernance de leur pays.
(…) (Pour réconcilier les jeunes et la politique), les forces vives de la nation doivent d’abord accepter le fait que les candidats indépendants ne puissent pas se présenter aux élections. Cela laissera la chance aux jeunes soutenus par les formations politiques qui sont des écoles politiques. Il leur incombe de les éduquer et de les former par rapport à la culture politique et à la gouvernance. Il faut avoir dans l’esprit qu’il y a deux phases dans la vie d’un parti. Celle de la conquête du pouvoir peut prendre beaucoup de temps. C’est là que les jeunes abandonnent, puisqu’ils aiment la facilité, par exemple accéder rapidement à un poste à responsabilités. Il est important de développer la culture de responsabilité au niveau des partis et de responsabiliser les jeunes. D’habitude, on leur confie des missions qui ne sont pas stratégiques : coller des affiches, organiser les activités sociales au niveau des communautés… Car ils ne sont pas intégrés dans les structures de décision. L’essence de la relève dans un bureau politique d’un parti est de les y impliquer. Quand j’étais cadre, j’avais l’audace de critiquer le parti en lui-même, même si nous étions au pouvoir. Aujourd’hui, j’en suis le secrétaire général national, mais je n’accepte pas facilement certaines idées qui ne me conviennent pas. Un jeune doit aussi apprendre à cultiver cette valeur. Certes, il faut respecter les aînés, mais cela ne signifie pas se soumettre automatiquement. C’est ça être jeune. Cela compte dans la considération au niveau du parti.
L’avenir des jeunes est vraiment incertain. Mis à part mes responsabilités au niveau du parti, j’enseigne également à l’université et, là aussi, je constate que les jeunes abandonnent facilement. Ils n’aiment pas poursuivre les études supérieures qu’ils considèrent comme trop difficiles et préfèrent plutôt s’orienter dans les services. Il n’y a rien de mal à cela, mais le problème est que les jeunes n’ont pas ce niveau de patience. La plupart d’entre eux aiment observer la situation, surtout dans le monde digital. Ils ne s’intéressent pas aux vrais sujets du pays. Vous pouvez constater que si on poste une publication sur Facebook concernant un fait divers, beaucoup de jeunes commentent et partagent. Mais lorsque la publication touche vraiment à la vie du pays, il n’y a que peu de réactions. Il est essentiel d’investir dans l’éducation des jeunes, quitte à mettre en place une structure à tous les niveaux qui forme les jeunes à la participation à la vie politique.
(…) Comment soutenir les jeunes ? (Si l’on veut mettre en place des dispositions encourageantes) la révision ou bien l’amendement de notre Constitution devront être effectués. Au niveau de l’Assemblée nationale, par exemple, il n’y a pas de quotas pour les jeunes, les femmes, les personnes en situation de handicap… Il faut débattre sur ces sujets. Si nous voulons que les jeunes participent (aux élections), ce gap de financement doit être solutionné. Cette contrainte du financement est très importante, sauf pour les grands partis qui ont déjà des bases politiques qui n’auront pas de problème pour pousser un candidat vraiment jeune.
(…) Au niveau des Collectivités territoriales décentralisées (CTD), la participation des jeunes est également rare. Il y a un gap dans les ambitions collectives. Les jeunes sont plutôt dynamiques dans les activités sociales, dans le sport… mais ils peinent à développer une dynamique collective par rapport aux divers questionnements relatifs au pays. La vraie question est de savoir comment développer chez les jeunes cette ambition
collective ? »