« À première vue, quand on parle de politique à Madagascar, c’est l’image des “vieux” messieurs et dames qui me viennent en tête. Puis arrivent les gens qui reviennent trop souvent dans des émissions télévisées ou qui parlent sans cesse à la radio. Et depuis quelques années, “politique” me fait aussi penser à ceux qui disent tout et n’importe quoi sur les réseaux sociaux. Mais je vois très rarement des images de jeunes. Nous entendons très souvent dire que la politique est l’apanage des anciens et des aînés à Madagascar. On dit qu’elle ne rime pas avec jeunesse, que les jeunes n’auraient pas assez d’expériences pour faire le poids dans les affaires publiques, car le loha malemy (fontanelle) d’un jeune ne s’est pas encore refermé, que les jeunes ont un désintérêt pour la politique. La société t’avertit de ne pas te mêler des affaires publiques tant que tu ne sais pas prendre de décision par toi-même dans ta vie.
Pourtant, malgré ces stéréotypes avec lesquels les anciens nous ont éduqués, pas mal de jeunes discutent de la politique ou des élections sur les réseaux sociaux et dans des lieux publics. Malheureusement, ces discussions ne font pas le poids dans le processus de décision. Nous entendons dire que ce ne sont que des jeunes rêveurs qui débattent sans concepts de base avec des raisonnements qui ne mènent à rien et ne permettent que de se donner bonne conscience en ne faisant pas grand-chose après. Personne ne fait attention à ces discussions, les décideurs ne les écoutent ni les entendent. Ils ne fréquentent d’ailleurs pas ces lieux. Viendra le temps où ces jeunes rêveurs construiront et partageront aux autres jeunes et au reste de la société une image plus claire de leur avenir. Les jeunes constituent également la majorité des membres et sympathisants de la plupart des organisations. Une telle vision fournira aux jeunes et à notre nation les jalons nécessaires pour le processus de notre participation dans les prises de décisions. Nous, au sein du TMR, sommes en train de nous organiser et de nous préparer afin de pouvoir entrer dans la cour politique “des grands” qui ont presque monopolisé le kianja depuis des décennies.
(…) La jeunesse constitue la plus grande partie de la population malgache dans ses composantes civiles, politiques ou religieuses. Face à la faiblesse de l’État, dans les zones enclavées, les jeunes s’organisent afin d’assurer des devoirs qui, normalement, échoient à l’État, comme la sécurité, la construction d’infrastructures agricoles, etc. Pour moi, cela prouve l’engagement effectif des jeunes dans la vie de leur communauté et de leur nation. Je trouve que la jeunesse se veut être au centre de la construction de notre nation. Et elle n’a pas d’autres choix. Les anciennes valeurs, traditions et cultures autour desquelles les clans, les groupes sociaux régionaux, les castes, les groupes de pression socio-économiques, les groupes religieux et politiques ne peuvent fédérer les Malgaches composés actuellement et majoritairement de jeunes orientés vers le progrès et le développement lovainjafy, ni relever les défis de notre vanimpotoana actuel. Nous n’avons peut-être pas encore pu révolutionner ou transformer le système, mais nous le faisons déjà vibrer et bouger de tous les côtés. Peut-être que notre poids est encore moins perceptible, car nous sommes encore atomisés, mais nous allons arriver à nous unir. Nous serons alors prêts à payer le prix de nos rêves. Nous, changerons ensemble la donne (manova rasa) et mettrons en place un système dont nous sommes le moteur. Nous piétinons les inégalités sociales et travaillons ensemble pour un État fort favorisant l’équilibre social, basé sur une croissance économique soutenue et le respect de la dimension écologique du développement. »